Le melon de Cavaillon, fruit de la passion
Les origines de ce fruit recherché, « chef d’œuvre de l’été » selon Voltaire, demeurent mystérieuses. Venu d’Inde, d’Iran ou d’Afrique, il était apprécié des Grecs de l’Antiquité. Les moines de Cantalupo, près de Rome, le magnifièrent sous la forme d’une variété ronde à chair orange et sucrée, le Cantaloup. Charles VIII le ramena en France à son retour des guerres d’Italie, la Provence l’adopta, ainsi que d’autres régions dont la Charente, d’où l’appellation de melon charentais. Mais c’est en Comtat qu’il devait trouver sa terre d’élection. Ce produit rare et luxueux y prit son essor dans la deuxième moitié du XIXème siècle grâce à l’abondance de l’eau fournie par le Canal de Carpentras. Son expédition transita alors par le marché de Cavaillon, capitale maraîchère. La qualité et la quantité de la production, ainsi mise à disposition des fins palais de France et d’ailleurs, donna ses lettres de noblesse au désormais célèbre « Melon de Cavaillon », fruit d’une passion collective. Alexandre Dumas, qui en raffolait, offrit les 300 volumes de son oeuvre complète à la bibliothèque de Cavaillon contre une rente viagère de douze melons par an !
Une culture délicate
Rebondi comme un ballon, orangé à l’intérieur, la peau verte virant à l’orange quand il arrive à maturité, le Canteloup ou Charentais est de loin le plus cultivé aux alentours du Ventoux. Très savoureux, on le trouve sous une apparence lisse ou bien veiné de motifs en relief, c’est alors le melon « écrit », aujourd’hui privilégié par les producteurs car moins fragile. D’autres variétés moins répandues mûrissent sous le soleil comtadin : le Galia, melon blanc, ou encore le melon jaune, en forme de ballon de rugby. La méréville ou gigerine, prisée de nos grands-mères qui en faisaient de délicieuses confitures, mûrit en septembre. Elle est destinée à la confiserie.
Cultiver le melon suppose de déjouer les multiples difficultés que sont la sécheresse, la fatigue des sols et les maladies. Souvent greffé sur des plants de melon sauvage pour être plus résistant, le melon se cultive sous serre froide ou en plein champ. L’arrosage est la condition de sa survie, de même que la taille du pied, qui permet de le fortifier. Les abeilles sont elles aussi indispensables pour fertiliser les fleurs. Ces soins minutieux dispensés à compter de février ou mars jusqu’en avril débouchent, si tout va bien, sur l’apparition d’un petit fruit vert qui va se gorger d’eau et de sucre sous le soleil. Lourd, la peau légèrement souple, il peut alors être cueilli avec délicatesse, généralement entre la mi-juin et la mi-août.
Le deuxième département producteur
Depuis les années 90, cette culture délicate a perdu du terrain, même si avec 36 000 tonnes par an le Vaucluse reste le deuxième département producteur en France et couvre 13% de la production nationale avec 430 exploitations. Cultivateurs et conditionneurs-expéditeurs travaillent ensemble à l’obtention d’une IGP (Indication Géographique Protégée) pour le « Melon de Cavaillon » dont la zone de culture, très large, englobe tout le Vaucluse, à commencer par le Comtat Venaissin et une partie de la Provence. Le « Melon de Cavaillon » est un charentais jaune. Il est défini par une aire géographique bien délimitée, possédant le climat et le savoir-faire adéquat. Le mode de culture raisonnée et maîtrisée en garantit la qualité gustative. Le fruit doit être cueilli mûr, et sa traçabilité garantie.