L’or rouge du « jardin de la France »
L’Antiquité appréciait les vertus de ce fruit sauvage, les jardins médiévaux l’ont domestiqué en cultivant des plants issus de fraises des bois. Au XVIIIème siècle, les premiers plants importés d’Amérique du Sud donnent naissance par croisement à la fraise telle que nous la connaissons.
A la fin du XIXème siècle, Carpentras découvre le filon de l’or rouge grâce au conserveur Alphonse Pécoul, qui l’a dégusté à Paris et en ramène les premiers plants. Les premières fraises sont plantées en 1882. C’est un succès fulgurant. Le Canal de Carpentras tout juste inauguré apporte sa manne d’eau providentielle et s’apprête à faire du Comtat le jardin de la France. La capitale comtadine adopte cette nouvelle culture alors que le vignoble est ravagé par le phylloxéra et les vers à soie décimés par la pébrine.
Très vite, la fraisiculture locale se taille une réputation. Les fraisières, jeunes Cévenoles, viennent par milliers chaque année aider à la récolte. On expédie les fruits en France et en Europe via la gare de Carpentras, alors en pleine ébullition.
Un savoir-faire minutieux
Jadis cultivée en plein champ, la fraise de Carpentras, marque déposée depuis 1987, a trouvé ici un terroir idéal, avec des conditions d’ensoleillement et de maturation exceptionnelles. Elle prospère aujourd’hui à l’abri de tunnels de plastique, appelés serres froides, qui lui font un rempart contre les nuisibles, la protègent des aléas climatiques et accentuent l’effet du soleil. Ces abris permettent aussi au producteur de moduler la température, en pratiquant selon les besoins des ouvertures qui laissent l’air circuler, voire en peignant l’extérieur des tunnels pour créer de l’ombre.
La culture de la fraise nécessite un savoir-faire minutieux, coûteux car gros consommateur de main d’œuvre, d’autant que les fraisiers sont à replanter chaque année. Les variétés privilégient la qualité gustative, la résistance, et l’étalement de la saison. La Garriguette, précoce et joliment parfumée, est cueillie au printemps. Les variétés remontantes, quant à elles, se ramassent du printemps aux gelées : la Ciflorette, particulièrement douce, la Mara des bois, la Reine des vallées, la Charlotte, la Pajaro… La fraise de Carpentras est l’une des premières fraises mises sur le marché chaque année. A elle seule, elle est le signe du printemps.
Plus de 50% de la production provençale
Environ 4 000 tonnes sont produites aujourd’hui sur le seul bassin de Carpentras, soit plus de 50% de la production provençale. C’est dire si la pépite rouge du Comtat a trouvé ici un terroir propice. 300 exploitations sont actives, la plupart combinant différentes cultures maraîchères. Conditionnée sur place en paniers traditionnels, ou en petites barquettes de plastique, elle est livrée sur l’ensemble du territoire français et au-delà. Elle fait le bonheur des familles avec enfants, qui en raffolent, des seniors, qui lui restent fidèles. Elle est attendue et servie sur les tables prestigieuses et figure officiellement au menu de l’Elysée comme du Parlement.